Thierry Perrin, directeur associé du BE thermiques Bastide Bondoux, revient sur la RE2020 et ses modifications pour le logement collectif.
Le 05/04/2022
La réglementation environnementale 2020, entrée en vigueur au 1er janvier 2022, révolutionne la conception des bâtiments. Pour se préparer à ses nouvelles exigences, Sogimm s’est entouré de partenaires tels que Bastide Bondoux, l’un des leaders de la thermique de l’habitat en France. Thierry Perrin, directeur associé de ce bureau d’études thermiques à Chaponost, revient sur la RE2020 et ses profondes modifications pour le logement collectif.
Présentez-nous la RE2020. En quoi diffère-t-elle de la RT2012 ?
La RE2020 est constituée de trois volets : l’énergie, le carbone et le confort d’été. Sur le volet énergie, on est sensiblement dans le même état d’esprit que la RT2012 avec un renforcement des exigences assez important sur l’indicateur Bbio qui va traduire la conception et l’isolation. L’accent est mis sur la réduction des consommations. Pour le logement collectif, on retrouve l’idée d’aller vers des énergies moins carbonées, c’est-à-dire des solutions à plus ou moins moyen terme avec du biogaz ou des pompes à chaleur. La grande nouveauté avec la RE2020, c’est le volet carbone. Il y a désormais un indicateur sur le bilan carbone de la construction. Le poids carbone d’un bâtiment va être calculé par l’intermédiaire de fiches environnementales. Enfin, l’indicateur confort d’été, bien plus précis et complet que le précédent, ne concernera qu’un grand quart sud-est, soit à partir de Valence. Ce ne sera pas vraiment un souci réglementaire pour la région Rhône-Alpes, d’autant plus lorsqu’on passe la barre fatidique des 400 m d’altitude, ce qui est le cas de nombreuses communes en Haute-Savoie.
Le volet carbone, grande nouveauté de la RE2020, va-t-il être difficile à appliquer ?
La RE2020 comprend des exigences progressives qui ont été définies sur différentes périodes : 2022-2025, 2025-2028, 2028-2031 et après 2031. En cette première phrase 2022-2025, la principale difficulté du volet carbone est liée aux fiches de données environnementales et sanitaires que nous pouvons récupérer sur une base nationale, INIES. A ce jour, lorsque nous faisons le calcul carbone, nous avons la moitié des fiches par défaut - extrêmement pénalisantes - qui sont réalisées par le ministère car les industriels n’ont pas encore créé les fiches adaptées à leurs produits. Par conséquent, les calculs carbone seront, dans un premier temps, d’une précision assez moyenne.
Pour le volet énergie, quels changements principaux faut-il mettre en place pour respecter la RE2020 ?
Pour le volet énergie, ça se joue surtout sur la partie conception ! Il faut essayer d’orienter au maximum les projets immobiliers vers le sud en termes de surfaces vitrées. Cela passe également par un renforcement de l’isolation, un meilleur traitement des ponts thermiques, une meilleure gestion des volets roulants et des brise-soleil de manière à avoir des choses un peu plus automatisées sous forme d’horloge de programmation ou de sonde d’ensoleillement qui permettront de mieux gérer la récupération d’apport solaire l’hiver et la protection solaire l’été.
La RE2020 est-elle synonyme de la fin du gaz dans les logements collectifs ?
Il y a un seuil qui va effectivement changer en 2025 sur l’indicateur Icénergie et donc sur les émissions de CO2 liées à la consommation du bâtiment. Le seuil maximum autorisé va être clairement réduit en 2025 et rendre plus compliqué l’utilisation du gaz mais cela ne veut pas dire que ce sera interdit ! Nous allons probablement nous orienter vers des systèmes mixtes alliant une pompe à chaleur et une chaudière à gaz, l’une pour l’eau chaude sanitaire et l’autre pour le chauffage, ou inversement. Il y a une volonté de GRDF de développer du bio gaz pour abaisser son seuil d’émissions de CO2 et rendre plus facile l’utilisation de chaudières gaz dans l’avenir.
Les matériaux biosourcés vont-ils devenir indispensables dans la construction ?
Jusqu'en 2025, le seuil carbone est suffisamment souple pour que les constructeurs et promoteurs ne soient pas obligés de travailler avec les matériaux biosourcés. Mais lors de la phase 2025-2028, ce seuil va être particulièrement bas et ils seront sans doute contraints d’utiliser certains de ces produits. Par exemple, du béton dit bas carbone, de l’isolation en laine de bois… Et pourquoi pas réaliser le dernier étage d’un immeuble en ossature bois de manière à vraiment amener du biosourcé dans la construction.
La RE2020 va-t-elle entraîner des surcoûts pour les acquéreurs ?
Les promoteurs parlent en général de 5 à 10 % de surcoût. La RE2020 va se traduire directement sur le coût de construction. Le prix des matériaux et des terrains étant également en hausse, cela risque de désolvabiliser de nombreux foyers qui souhaitent accéder à la propriété.
Les acteurs du logement collectif ont-ils pu se préparer suffisamment en amont à ces changements ?
Oui et non ! Nous avions à peu près les grandes lignes sans pouvoir aller dans le détail.… Mais les derniers textes sont parus le 13 décembre pour une application à des dépôts de permis au 1er janvier. Le timing était un peu juste pour estimer les surcoûts, notamment au niveau de l’isolation.
Sur quels projets avez-vous collaboré avec Sogimm et le Groupe Monod ?
Nous collaborons sur différents projets immobiliers depuis 2015. Le premier d'entre eux était la résidence du Marais à Vallières (Le Village des Muses). Plus récemment, nous avons travaillé ensemble sur les programmes Origami à Cran-Gevrier, Natur'Home à Sillingy et Villae à Epagny.